Jeff Eusebio : « Quand il n’y a pas de scène, il n’y aura pas de slameurs »

Article : Jeff Eusebio : « Quand il n’y a pas de scène, il n’y aura pas de slameurs »
Crédit: Jeff Eusebio, slameur togolais, avec l'aimable autorisation de l'artiste lui-même
5 janvier 2022

Jeff Eusebio : « Quand il n’y a pas de scène, il n’y aura pas de slameurs »

Le slameur togolais Jeff Eusebio continue de marquer les esprits. Avec son style reconnaissable entre mille, ce jeune artiste a su se tailler une fanbase dont le nombre ne cesse de grandir au fil du temps. Plus d’une fois sacré lors des compétitions nationales, Jeff Eusebio parle dans ses chansons du respect qu’on doit à l’environnement, la place qu’occupe les femmes, ainsi que d’autres causes toutes plus légitimes les unes que les autres. C’est pour nous une occasion de l’inviter à nous parler un peu plus de lui.

Vouloir décliner le palmarès de celui qui a pour nom Tamatekou Woèbagnon Eusèbe Eyram à l’état civil, c’est s’exposer au risque d’un compte d’apothicaire. Qu’importe, osons le pari d’un portrait-robot artistique à tout le moins fini : trois fois champion de la coupe nationale calebasse challenge (2017,2018,2019), champion du jeu dit jeudi en 2018, vice-champion du championnat francophone ouest-africain de slam en 2018, lauréat du concours de l’ONG Rapaa en 2018, champion du concours de l’ONG Rapaa en 2020, vice-champion du championnat national de slam en 2020, lauréat au concours de Slam du festival international du film environnemental en 2019… Qui dit mieux ? Pour Jeff Eusebio, le slam, ce n’est pas seulement le « schelem de poésie », selon la formule consacrée. « Le slam c’est dire son ressenti, et exprimer ses émotions afin de nourrir les âmes… Alors un slameur qui n’a pas où s’exprimer est une erreur. Quand il n’y a pas de scène, il n’y aura pas de slameurs ». Traduction : la scène est fondamentale dans l’art qu’exerce tout slameur qui se respecte. Ne vous y méprenez pas. Ce jeune homme qui aurait pu jouer le rôle de jeune premier au théâtre ou au cinéma, a su tracer sa route, et n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Comment est-il arrivé au slam ? « Par mon amour pour la poésie », clame-t-il, comme quand il déclame sur scène avec une verve spéciale dont il a le secret. En février de cette année, Jeff Eusebio et son compagnon de toujours Menteur Ambulant seront en tournée Slam avec le spectacle « Aller- Retour au Louvre » dans toutes les régions du Togo. Mais avant, prêtons oreille aux dires du « vilain poète qui met son art au service du beau ». Lecture.

Comment est née votre passion pour le slam, et à quel âge avez-vous commencé à slamer ?

Je suis arrivé au slam par mon amour pour la poésie, la musique et surtout mon esprit de partage… J’ai constaté très tôt qu’au-delà des mots et du son, le slam transmet en grande partie de l’émotion. Ce qui rend cet art assez sublime. J’ai commencé le slam à l’âge de 18 ans.

Quels sont les thèmes que vous développez à travers votre musique ?

Je suis ouvert à tous les thématiques, et surtout avec le nombre de projets que j’ai eu à mener, ça m’a fait travailler sur beaucoup de choses.

Aujourd’hui, il y a des sujets aussi prégnants que la défense des droits des femmes, l’environnement, le racisme dans le monde. Avez-vous déjà touché ces thèmes dans votre musique ?

Oui j’y suis à fond, parce qu’on travaille avec des associations et ONG qui militent pour la cause de l’environnement et l’égalité du genre… Je rappelle aussi que j’ai remporté une compétition d’écoslam en 2016. Et trois fois la coupe nationale Calebasse Challenge en 2017, 2018 et 2019 portant toujours sur la thématique de l’environnement.

Jeff Eusebio dans un événement, Crédit : Jeff Eusebio
Difficile de ne pas être ému quand on vous voit slamant sur scène avec une façon de scander dont vous avez le secret, comment faites-vous ?

Je n’ai pas de secret vrai dire, j’essaie chaque sur scène de donner le meilleur de moi et rendre les textes le plus solennels possible.

Comment peut-on qualifier votre musique : engagée, contestataire, féministe, écolo, panafricanisme ?

Engagée, parce qu’être féministe c’est de l’engagement, être écolo c’est toujours de l’engagement pour la cause de l’environnement… Du coup je fais une musique engagée pour plusieurs causes.

Pensez-vous que le slam a son rôle à jouer dans ce monde ? Si oui, quel est-il, ce rôle ?

Oui sans doute, le slam à beaucoup de rôles à jouer, et qu’il a commencé déjà par jouer d’ailleurs… Principalement un rôle instructif, ludique et surtout distractif…

Jeff Eusebio sensibilisant sur l’importance des mesures barrières
Que répondriez-vous à ceux qui soutiennent que le slam est politiquement correct, que le rap est beaucoup plus contestataire ?

Je ne partage pas complètement leurs idées, parce que les rappeurs ne font pas les mêmes choses. Il y en a qui sont très poétiques et très instructifs. C’est d’ailleurs pourquoi on dit que certains font par exemple du rap conscient.

Nous sommes en 2021, vous n’avez pas manqué de penser une autre mode de vie après la survenue de cette pandémie…

Oui, comme tout citoyen de la Terre, la pandémie a un peu secoué nos quotidiens et on a du mal à imaginer ce que nous réserve demain… Du coup on se bat pour redresser l’humanité avec beaucoup de positivité.

Revenir sur scène après plus d’un an de pause vous a forcément fait du bien…
Jeff Eusebio en feat avec un autre slameur tout aussi prometteur Mesko

C’est carrément thérapeutique, car le Slam sans scène n’est que ruine de l’âme. Le slam c’est dire son ressenti, et exprimer ses émotions afin de nourrir les âmes… Alors un slameur qui n’a pas où s’exprimer est une erreur. Quand il n’y a pas de scène, il n’y aura pas de slameurs.

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes qui veulent faire leurs premiers pas dans l’art que vous pratiquez ?

D’abord c’est d’aimer la lecture afin de s’enrichir en culture générale et de maîtriser l’un des outils nécessaires de cet art qu’est la langue.

Quels sont vos projets à venir ?

On a un spectacle qui se prépare pour le début du 2ème semestre de l’année, mais déjà en février 2022 on prépare une tournée Slam avec le spectacle « Aller- Retour au Louvre » dans toutes les régions du Togo, et pleins de surprises à découvrir tout au long de la nouvelle année. D’ici là, bonne année à toute et à tous.

Kossivirtus

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