Togo : Aux Embuscades de la Scène, l’entrée des jeunes metteurs en scène dans le monde professionnel

Article : Togo : Aux Embuscades de la Scène, l’entrée des jeunes metteurs en scène dans le monde professionnel
Crédit: Kokou Paraiso
26 octobre 2021

Togo : Aux Embuscades de la Scène, l’entrée des jeunes metteurs en scène dans le monde professionnel

La troisième édition des Embuscades de la Scène se tiendront les 29 et 30 octobre prochains à l’Espace Fiohomé, un centre culturel sis à Agoè Plateau. De la soirée-hommage pour Robert Silivi à Gueule de cloche langue de pierre, de Jean Kantchébé, en passant par Drapée de Thé, l’autre texte à l’affiche signé Joël Ajavon, Les Embuscades de la Scène’’ ont de quoi intéresser les amoureux des planches. Mais pas que, car Monsieur Tout-le-monde est également invité à cet événement dont Kokou Babatoundé Paraiso, comédien, et conteur, est le promoteur. Le thème de cette édition ? Justement, il n’y en a aucun : « parce qu’on s’est dit que les œuvres que nous allons présenter parlent d’elles-mêmes, et elles véhiculent un message assez fort. Elles envoient à des interrogations assez philosophiques, à des introspections assez précises», s’est justifié le responsable du projet. Dans cet entretien, Kokou Babatoundé Paraiso fend l’armure. Pour lui, les jeunes metteurs en scène sont appelés à se confronter à la réalité aussi bien professionnelle, semi-professionnelle que profane. Ce n’est qu’ainsi qu’ils pourront « grandir artistiquement ». Lecture.

Kossivirtus : Parlez-nous brièvement des Embuscades de la scène :

Kokou Babatoundé Paraiso : Les Embuscades de la scène sont une plateforme de programmation dédiée à la formation et à la visibilité des jeunes metteurs en scène du Togo. Cette année, nous en sommes à la troisième édition.

Quelle est la particularité de cette édition ?

Cette édition est une édition assez spéciale, parce qu’il y a déjà pratiquement une année, on n’a pas pu réaliser ce qu’il faut, en raison de la crise sanitaire. Cette année, grâce au fonds d’aide à la culture et à quelques partenaires, on a réussi à mettre sur pied une édition qui va être spéciale dans la mesure où les activités vont être concentrées sur deux jours. Nous essayerons de rendre hommage à l’un de nos dramaturges qui a vraiment marqué toute une génération par ses œuvres. Il s’agit de feu Robert Silivi qui était enseignant de Lettres au Lycée Français de Lomé. Il fut aussi président de l’Association Escale des Écritures. Au niveau de notre staff nous avons jugé bon de lui dire merci pour le travail abattu. Quand on lit les pièces, les œuvres qu’il a écrites, il y a vraiment de quoi se poser des questions. Je fais partie d’une génération qui ne l’a pas trop connu. Je l’ai seulement connu en une soirée, après par ses œuvres. J’ai été marqué par son départ brutal, encore plus par la singularité de ses écrits. On s’est dit : pourquoi ne pas lui consacrer une soirée.

La deuxième soirée sera consacrée à la première du spectacle Gueule de cloche, langue de pierre, un texte de Jean Kantchébé que je mets en scène. Il y aura ensuite la présentation d’une exploration de Drapée de Thé, le texte de Joël Ajavon. L’autre particularité de cette année est que nous travaillons en étroite collaboration avec Escale des écritures grâce à leur œuvre Balade théâtrale 3, et la majeure partie des textes utilisés y sont puisés.  C’est notre manière à nous de consommer togolais. Au niveau des Embuscades, nous avons fait le choix de mettre en avant nos auteurs, donner de la valeur à nos auteurs qui, sous d’autres cieux, sont respectés.  Les Embuscades sont donc un portail qui permet de pouvoir lire ces auteurs-là qui disent des choses assez profondes, des choses assez intéressantes.

Programme
Pourquoi le choix de Joël Ajavon plutôt qu’un autre, y a-t-il d’autres auteurs qui participent au projet Balade théâtrale ?

Au niveau des Embuscades de la scène, nous avons confié le soin aux jeunes metteurs en scène de choisir les textes eux-mêmes. Cela ne veut pas dire que Galley n’est pas un bon auteur, loin de là. Il est respecté. Ce qui est intéressant est que Lucien Galley sera des nôtres, à la soirée Robert Silivi. Au lancement, un des textes de Lucien a été lu.

Quel est le thème de cette édition ?

Cette année nous avons fait exprès de ne pas choisir de thème, parce que on s’est dit que les œuvres que nous allons présenter parlent d’elles-mêmes, et elles véhiculent un message assez fort. Elles renvoient à des interrogations assez philosophiques, à des introspections assez précises. Nous avons donc choisi de laisser au créateur le choix de pouvoir parler à travers les textes choisis et d’en dire deux trois choses. Comme le dirait quelqu’un, on fait un métier qui se vit.

Qu’en sera-t-il des mesures sanitaires ?

Elles sont de rigueur, et il y a un quota à respecter par rapport au public qui fera le déplacement. 

Pourquoi le choix de Fiôhomé comme réceptacle des Embuscades ?

Fiôhomé est un centre parapublic qui accueille des spectacles et des résidences. Il est également un partenaire de notre structure la Compagnie Olatomi que je dirige. Fiôhomé fait partie des premiers partenaires qui ont donné leur ok quant j’ai lancé l’appel de cette édition. Par ailleurs, je travaille avec tout le personnel de Fiôhomé sur ce projet-là. Il reste un cadre assez intéressant, un cadre qui parle aux créateurs, aux artistes. L’idée première n’était pas de faire les Embuscades à Fiôhomé cette année, on voulait présenter des spectacles dans les rues, mais à cause de la Covid, on s’est dit qu’il vaudrait mieux concentrer nos énergies à Fiôhomé, en espérant que d’ici l’année prochaine tout aille mieux afin qu’on puisse prendre d’assaut les artères de Lomé.

Après trois ans de parcours, quel bilan d’étape faites-vous ?

On peut être fier parce que ceux qui sont passés par les Embuscades font aujourd’hui partie de cette jeune génération du théâtre qui fait la fierté du Togo. Je peux citer Félicité, Anifa,  il y a Bach***, moi-même, il y a les Tabala qui aujourd’hui ont fait l’unanimité de part leur travail, sans prétention. Je viens d’une génération qui a très tôt pris la mesure de la chose, en se mettant au travail. Ce sont des gens qui, après les Embuscades, continuent de bosser. On est vraiment heureux des trois ans de parcours des Embuscades. On a une nouvelle recrue qui s’appelle Yérima Adjaratou qui va diriger l’exploration sur le texte de Joël, avec une autre comédienne qui arrive aussi en force, sans oublier un autre comédien. On est content d’avoir contribué à ce que cette jeune génération puisse rayonner et faire flotter haut le drapeau togolais.

Comment les Embuscades de la scène ont vu le jour ?

Le projet est né quand j’étais encore étudiant avec un ami, Sèdjro Giovanni Houansou, auteur dramaturge et metteur en scène béninois. On s’est vu sur un festival estudiantin à Niamey, en ce moment, il était le SG dudit festival. On discutait des opportunités quand l’idée lui est venu comme ça. Il a fait remarquer qu’on sait comment former un comédien, on sait comment former un acteur, mais on ne sait pas comment former un metteur en scène. Il n’y a pas de structure qui forme les metteurs en scène. Pour un jeune créateur, c’est vraiment difficile d’abord de trouver l’espace pour créer, ensuite de trouver le moyen de diffusion après création. Pourquoi ne pas mettre en place une plateforme qui puisse contribuer à résoudre ce problème-là, d’où les Embuscades de la scène. La première édition des Embuscades de la scène a eu lieu à Cotonou au Bénin, c’était une belle expérience, ensuite nous avons voulu faire l’expérience à Lomé. Aujourd’hui, les Embuscades de la scène se tiennent dans trois pays, le Togo, le Bénin et le Burkina Faso. Le Burkina Faso organisera les siennes en décembre prochain, et le Bénin prendra la relève l’année prochaine.

Quel est le public cible ?

Les Embuscades de la scène attendent Monsieur Tout-le-monde, parce que les jeunes metteurs en scène sont appelés à se confronter à la réalité aussi bien professionnelle, semi-professionnelle que profane. C’est pour nous une manière de les amener dans le monde « professionnel », de les confronter aux routiers du boulot, de leur permettre de confronter leurs idées, de pouvoir grandir artistiquement par rapport à leur choix de metteur en scène, à leur choix de travail artistique. Quiconque ne sait rien du théâtre peut donc également venir. Il verra un spectacle, il dira quelque chose qui, quelque part va aider le créateur ou l’équipe à grandir et à changer les choses pour que les prochaines fois soient meilleures.

Kossivirtus
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