Entre joie de retrouver la scène et souhait d’un monde plus humain : rencontre avec Céline Banza, Prix découvertes RFI 2019

Article : Entre joie de retrouver la scène et souhait d’un monde plus humain :         rencontre avec Céline Banza, Prix découvertes RFI 2019
Crédit: Augustin Anonwodji
28 février 2021

Entre joie de retrouver la scène et souhait d’un monde plus humain : rencontre avec Céline Banza, Prix découvertes RFI 2019

Dans le cadre de sa tournée musicale, interrompue en avril 2020 à cause de la pandémie, l’artiste chanteuse congolaise Céline Banza a donné un concert tout en émotion sur la scène Jimi Hope de l’Institut français du Togo le 26 février. Davantage un soulagement, renouer avec la scène a été un moment inoubliable partagé avec le public togolais, mais aussi avec la diaspora congolaise du Togo.

Cette soirée comme on n’en fait plus a été pour nous une occasion de s’entretenir avec l’artiste afro-folk une fois sa prestation terminée. De l’histoire cachée derrière son tout premier opus « Praefatio » à sa collaboration avec le rappeur français d’origine congolaise Youssoupha, du viol érigé en arme de guerre dans son pays le Congo au droit que tout humain doit avoir, la jeune chanteuse n’a pas hésité à faire le tour des questions qui lui ont été posées. Lecture.

Kossivirtus : Qu’est-ce que ça fait de retrouver la scène après une si longue pause ?

Céline Banza : C’est un grand plaisir. Franchement, c’est un grand plaisir, c’est comme quelqu’un qui sort de la prison. Tu respires quoi, c’était un super moment, et franchement on doit vivre avec cette pandémie c’est vrai, mais on ne doit pas arrêter les activités culturelles, les concerts, ça nous fait vivre, en fait. L’art, la culture nous fait vivre, et on doit apprendre à vivre avec cette pandémie avec la culture, avec la musique parce que ça nous garde debout.

Entre-temps, vous avez sorti un album, Praefatio, qui sonne latin. Y a-t-il une histoire derrière ce titre hors du commun ?

Bien sûr, j’ai terminé en latin philo pour mon bac (Baccalauréat, NDLR), donc on traduisait les textes de Cicéron, et puis il y avait un texte qui s’appelait Praefatio. J’étais éblouie quand je lisais ces textes-là, quel plaidoyer ! Je m’étais dit que si un jour je sortais un album, je l’appellerais Praefatio, préface. C’est une introduction dans ce monde musical qui n’est pas facile, et qui est très grand.

En plus d’être musicienne, on vous dit cinéaste, vidéaste, ça ne fait pas beaucoup pour une artiste comme vous ?

Je ne me définis pas comme cinéaste, encore moins comme vidéaste. On est artiste et les artistes, ils se découvrent tous les jours. Il y avait un moment où je ne composais pas des chansons, j’ai rencontré des personnes, j’ai plein d’amis metteurs en scène, comédiens, cinéastes et tout, donc il y avait un projet, on dit Céline, est-ce que ça te tente ? Je dis ouais pourquoi pas, donc j’ai joué un rôle principal dans un film, j’ai joué aussi dans une pièce de théâtre, mais cela ne fait pas de moi comédienne. Je me découvre. Peut-être que demain je serai journaliste ou chroniqueuse, je n’en sais rien. On se découvre, on prend du plaisir.

Toujours est-il que le thème de la femme revient sans cesse dans votre art, quand on prend la chanson Tere M’bi, pour n’en citer qu’une. Peut-on y voir du féminisme ?

Non, pas du tout. On est humains, avant tout. On est tous humains, c’est les femmes, c’est les hommes. Moi je pense qu’on a toujours eu ce problème avec les femmes, notre regard envers les femmes et tout, et je pense qu’on doit s’en rendre compte. Tere M’bi est une remise en question, un cri. C’est une colère aussi. Surtout dans mon pays, les femmes sont violées, marginalisées ou victimes. Le bonheur, le droit des femmes sont violés. Mais nos vertus ne le seront jamais.

Les femmes sont fortes, elles portent l’humanité dans leur dos, parfois, elles ne s’en rendent pas compte elles-mêmes, elles veulent rester derrière elles-mêmes. Elles se donnent des limites. Et donc les femmes doivent elles-mêmes se donner du respect, elles doivent se donner leur places elles-mêmes, elles doivent se donner les moyens elles-mêmes pour avancer, c’est comme ça qu’on les respectera, et c’est comme ça qu’elles seront autonome, c’est comme ça qu’on leur donnera le respect qu’il faut.

On peut dire que c’est votre engagement pour elles…

Pas pour elles, mais pour les humains, pour l’humanité, parce qu’aujourd’hui, ce n’est pas pour rien qu’on a lutté pour que les filles aillent à l’école, ça veut dire qu’on est tous humains, donc on devrait avoir le même respect. Je ne prends pas partie. Seulement, on a tous nos droits, on a tous nos devoirs, et donc les femmes, on doit les respecter comme on respecte les garçons.

Céline Banza, l’actualité est toujours déchirante, quand on voit des guerres tribales qui sévissent dans votre pays, le Congo, qu’est-ce que cela vous dit en tant qu’artiste ?

C’est triste, la situation actuelle de mon pays qui dure comme ça depuis des années. Moi je fais ma part, en tant qu’artiste, et j’espère que le gouvernement fera aussi sa part. Aujourd’hui, on vit avec les meurtre. C’est triste : là-bas, ils vivent la guerre, ils sont violés et volés. Je pense que chacun doit faire sa part en tant qu’humain dans son domaine. Cette situation doit bien changer.

Venons-en au Prix découvertes RFI, ce n’est pas rien…

Le Prix découvertes en 2019, c’était une étoile qui est tombée, c’était aussi le résultat de beaucoup de travail, de beaucoup de patience. C’est un travail d’équipe. Depuis, il y a eu la signature avec le label Bomayé (Musik, sic). Depuis, on a commencé notre belle aventure.

Il y aura sûrement d’autres albums après Praefatio ?

Praefatio vient de sortir, il faut que les gens écoutent, il faut qu’on profite, il faut qu’on en parle, il faut qu’on vive ces moments ensemble avec vous, donc on a tout notre temps. Entre-temps j’ai été en studio, moi je continue mon boulot.

On vous présente comme la protégée de Youssoupha, le lyriciste bantou, qu’en dites-vous ?

Youssoupha, c’est une très belle aventure. Après, c’est les gens qui voient, c’est les gens qui décident. C’était en tout cas une très belle aventure avec Youssoupha.

Kossivirtus

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